"Buzzons contre le sexisme"

Prix spécial enseignement agricole

Le concours "Buzzons contre le sexisme", a pour vocation première de donner la parole aux jeunes, de leur permettre de s'emparer des sujets liés aux inégalités femmes- hommes pour exprimer leur perception et la partager avec d'autre jeunes.

Nouveauté de l'édition 2022-2023 : dans le cadre d'un partenariat avec la DGER, une catégorie et des prix spécifiques Enseignement Agricole

Pour Joséfine Ajdelbaum et Barbara Wolman (vidéastes créatrices notamment de la "Matilda.Education, vivre l'égalité" et du concours "Buzzons contre le sexisme"), permettre une parole libre , en mixité, sur ces sujets est primordial et est surtout le "chemin" le plus efficace vers une évolution de la société.
Depuis 10 ans les sujets abordés ont bien évolué, et si la question des tâches ménagères était très présente au début, ce sont celles des violences qui prédominent aujourd'hui.
Les courts mètrage étonnent toujours par leur créativité, de la fiction au documentaire en passant par des formes plus poétiques ou des parodies de journaux télévisés...
Le jeu , le "faire semblant", permettent réellement de libérer la parole, en particulier celle des filles qui peuvent enfin se sentir légitimes.
L'enjeu pédagogique de ce dispositif pour les années à venir est de pouvoir permettre aux jeunes et aux éducateurs pour qui cela n'est pas toujours facile, de réfléchir aux rapports de domination qui sous-tendent les inégalités femmes-hommes, sans avoir peur de stigmatiser les gaçons. Il s'agit en fait de leur permettrre , à eux aussi , de se libérer du poids des injonctions de genre.

À l'occasion des 10 ans du concours, le Réseau Insertion-Égalité a rencontré Joséfine Ajdelbaum et Barbara Wolman
Écouter l'interview sur https://reseau-insertion-egalite.educagri.fr

Regards croisés sur l'aventure "Buzzons" dans l'enseignement agricole

Depuis sa création, le concours "Buzzons contre le sexisme" a été plébiscité de nombreuses fois par les enseignants en lycée agricole. Les retours d'expériences de Stéphanie Prévost (Lycée de la vallée de l'Hérault), Christophe Canino (Lycée de Castelnau le Lez), Simon Delorme (Lycée de Chambray les Tours) et de Christian Nauraye (Lycée de Mirecourt) qui participent à l'édition 2021, nous permettent de comprendre pourquoi et comment ce projet permet d'engager les élèves avec autant d'enthousiasme.

Comment l'idée de participer à ce concours a-t-elle été accueillie par les élèves ?
C. Canino (enseignant en EPS) : Ils/elles ont été surpris que je leur propose cette réflexion car pour eux c'est une évidence de pouvoir être mieux ensemble avec les garçons grâce à l'EPS. Sauf que parfois, certains garçons immatures veulent montrer leur supériorité physique !
C. Nauraye (CPE) : Je me suis particulièrement interrogé cette année sur le rapport entre les filles et les garçons car je sentais de par les différents échanges avec certaines élèves qu'une tension pouvait se faire ressentir. Je me demandais si le confinement l'année précédente pouvait avoir accentué la difficulté de ces rapports. J'ai tout d''abord envoyé un questionnaire via Pronote à tous les élèves de l'établissement qui m'a permis d'avoir (je pense) plus d'honnêteté dans les réponses liées à l'anonymat de la démarche, afin de déterminer la vision des garçons et des filles sur la position de la " femme " dans la société et au sein de l'établissement. Je souhaitais vraiment me concentrer sur les difficultés de nos élèves pour centrer le projet et qu'il soit plus parlant pour eux. Les personnes pleinement actrices du projet sont une quinzaine d'élèves de la 3ème à la terminale
S. Prevost (enseignante pluridisciplinaire) : Pour présenter le projet je suis partie d'une histoire (vraie !) que je venais de vivre avec ma fille de 10 ans, obligée par une AVS de son école à remettre son pull car son t-shirt (col roulé blanc) laissait trop apparaitre ses formes naissantes. Les élèves ont été choqués. J'ai alors pu introduire aisément l'inégalité persistante entre les hommes et les femmes concernant le corps et la sexualité. Mais plusieurs élèves ont exprimé des réticences, pour des raisons très diverses : souhait de se lancer dans un autre type de projet (solidarité), difficulté de se laisser filmer (et donc le port du masque a été plutôt utile !), difficulté d'aborder un thème lié à la sexualité par peur du regard des autres et de l'enseignante (une élève m'a même avoué que chez elle c'était un sujet tabou et que c'était la première fois qu'elle entendait parler de sexualité (16 ans)).
S. Delorme (enseignant ESC) : Chaque année en équipe pédagogique, nous avons à coeur de faire participer nos CAP deuxième année à un projet vidéo. Les élèves attendent ce projet avec impatience mais aussi quelques inquiétudes. Celles-ci sont, principalement, liées au fantasme systématique de l'échec (c'est trop dur, on ne va pas y arriver...). Mais la forme plus légère du tél portable, permet une appropriation plus rapide d'autant que les élèves, à force de visionnage, ont déjà des notions implicites de cadrage, raccords ou montage.

Comment le thème de la vidéo que vous avez réalisée a-t-il été choisi ?
S. Prévost : Nos débats ont permis de ratisser largement le thème des inégalités et des stéréotypes en matière de sexualité. Mais c'est vraiment le thème du consentement qui a marqué les élèves et notamment la vidéo de la " Cup of tea ". Les élèves avaient de nombreux préjugés sur le consentement et il était intéressant de les déconstruire d'abord pour les aider à réaliser leurs vidéos et aider d'autres personnes à déconstruire leurs propres préjugés.
S. Delorme : A partir des thématiques proposées par le dispositif, nous avons organisé un grand remue-méninges sur " Les représentations sexistes sur l'amour et la sexualité chez les ados ". Cet exercice est possible en toute liberté de parole car nous travaillons sur les notions de débats mouvants, participatifs ou d'outils collaboratifs dans d'autres projets. A partir du matériel récolté, nous avons fabriqué une carte mentale pour trier et y voir plus clair. Ceci a facilité le travail d'écriture pour les scénettes à mettre en image.

Quels sont les atouts pédagogiques d'un tel projet ?
S. Delorme : J'ai le sentiment que ce moyen d'expression casse la barrière mentale que nombre de ces élèves dresse face à l'écriture (nombreux sont ceux qui souffrent de problèmes " dys " ou ne maîtrisent pas encore la langue française). Et pourtant, sans que ce soit anxiogène, ils se confrontent à cette question de l'écrit dans ce type d'exercice. Enfin avec l'expérience, je peux dire qu'il se développe quasi systématiquement un lien affectif entre les élèves et le film réalisé : Ils sont fiers de leur travail, se sentent valorisés et reconnus. C'est pourquoi nous envisageons toujours ce projet un peu avant les examens pour favoriser la confiance en soi...
C. Canino : L'utilisation de la vidéo est adaptée au mode de vie actuel et aux nouveaux besoins et attentes de la société. Ce projet m'a particulièrement permis de mettre en exergue l'acte éducatif par l'apprentissage moteur et l'intelligence motrice, très frustrée dans les circonstances actuelles !
S. Prévost : La vidéo est un outil de communication privilégié par les élèves parce que les vidéos font partie de leur quotidien. La vidéo est donc ancrée dans leur culture et leur génération. L'écriture d'un scénario imaginaire est en réalité teinté de l'expérience et des émotions de chaque élève mais permet aussi de structurer la pensée. La vidéo et la scénarisation renforce l'engouement des apprenants qui peuvent laisser libre cours à leur créativité. Ces créations développent l'autonomie et rendent les élèves acteurs de leurs apprentissages tout en permettant un apprentissage collaboratif et social.

Et pour vous, quels sont les " bénéfices " de cette expérience ?
C. Nauraye : J'ai choisi le métier de CPE pour pouvoir accompagner les adolescents dans leur parcours de vie. Construire quelque chose avec eux, les voir participer, dynamiques, passer un moment agréable me conforte dans mon souhait de continuer à les mettre en avant. Ils sont très souvent doués de créativité, force de propositions ...Aussi tout moment qui leur est donné pour avoir une liberté de parole fait partie dans mon approche du métier, et des moments les plus importants.
C. Canino : Ce projet m'a permis une ouverture vers de la communication et vers de la transparence sur le quotidien vécu. J'ai également beaucoup apprécié le travail en interdisciplinarité avec d'autres collègues, c'est essentiel !
S. Delorme : En tant qu'enseignant, cela m'a permis de mettre en oeuvre une pédagogie active. En tant que personne, de renforcer mes liens avec une classe dont je suis par ailleurs prof principal.
S. Prévost : Pour l'instant je ne vois que du positif ! Je construis le cours avec eux au fur et à mesure. C'est un vrai travail d'équipe dans lequel je m'épanouie pleinement et qui renforce un peu plus les liens que nous tissons depuis le début de l'année. Ils me font confiance, et cette confiance est réciproque. Fervente amatrice de la pédagogie de projet, cette expérience me démontre encore une fois que les élèves sont surprenants et qu'en les laissant devenir acteurs de leurs apprentissages, en les plongeant dans la réalité, en les obligeant à sortir de leur zone de confort ils sont capables de faire des merveilles.

Et à la question, renouvellerez-vous votre participation ?", nos quatre témoins répondent, sans hésiter, "rendez-vous l'année prochaine !"

 

MASA - DGER - SDPOFE - Bureau de l’action éducative et de la vie scolaire

78 rue de Varenne, 75349 Paris 07 SP

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